Mon intervention sur la politique de solidarité


JLT 30 novembre 2017

 

Mes Chers Collègues

 

D’abord,  quelques remarques générales

 

  • L’examen du PLF intervient dans un contexte de croissance retrouvée grâce aux politiques conduites durant le précédent quinquennat. Les efforts de tous, les économies réalisées et les réformes structurelles autorisent de l’optimisme et des recettes supplémentaires.

 

  • Nous devrions être au moment de la juste répartition des fruits savoureux de la dynamique restaurée. Hélas, la plus grande partie de la corbeille a d’ores et déjà été attribuée  avec plus de 5 milliards d’euros aux particuliers fortunés pourtant repus.

 

Sur la mission solidarité, insertion et égalité des chances

 

  • L’augmentation des crédits de la mission peut paraître confortable. En réalité, elle s’établit à 2.1% par rapport aux dépenses réelles de  2017
  • Ainsi, la solidarité n’est pas au hit parade des priorités du Gouvernement et pourtant, c’est le plus sûr moyen, d’assurer par la cohésion sociale l’élan collectif pour une nouvelle croissance. Ce que confirme, aujourd’hui, le FMI.

Les cadeaux  aux plus riches obligent, malgré le surcroît de recettes, à en modérer les bénéfices pour les plus modestes. Et à le dissimuler derrière un discours flatteur, qu’aucun de nous ne renierait si on ne reprenait  – en sous main – ce que l’on a accordé.

 

La prime d’activité fournit, une fois de plus, l’illustration d’une politique en parfait trompe l’œil

 

  • La prime d’activité a été un vrai progrès pour les travailleurs modestes. Elle a contribué à réduire le taux de pauvreté et à augmenter leur pouvoir d’achat.

Elle a remplacé avantageusement la Prime pour l’emploi et le RSA chapeau dont le taux de recours était inférieur à 35%.

Le nombre de bénéficiaires à crû très vite – avec une moyenne  d’environ 155 € – et a constitué un encouragement au retour ou au maintien dans l’emploi.

Ainsi, dans une conjoncture difficile, 9% des allocataires RSA socle sont devenus éligibles à la prime d’activité en 2017 et 79% des bénéficiaires ont conservé leur emploi.

 

  • La Prime d’activité est promise à une augmentation de 20€ par mois mais en fin 2018 bien sûr.

Or, les dépenses réelles de 2017 atteignaient 6,5 milliards.Et 2018 connaît une inscription  à même hauteur . Ce qui laisse entendre une volontaire sous-estimation ou une réduction non avouée du périmètre des bénéficiaires.

  • C’est déjà le cas avec la suppression de la prise en compte comme revenus du travail des rentes AT-MP rendant inéligibles à la Prime d’activité. Ceci est une grande violence à l’égard de ceux qui, justement, sont les victimes de leur travail.
  • Pour la prime de Noël : 476 millions inscrits alors que l’année 2017 se soldera par une dépense de 556 millions
  • Même sous-évaluation pour le RSA jeunes : c’est 8 millions en 2016, presque 10 millions en 2017. Seuls 5.4 millions nous sont proposés en 2018.

 

A propos de sous-évaluation,  laisse-moi évoquer un souvenir : le débat  passionné  sur cette fameuse prime d’activité. Débat au cours duquel, la majorité sénatoriale, voulait tenter de montrer sa capacité à proposer des économies et en même temps – plaisir suprême –pouvoir qualifier d’insincère le PLF 2016. Elle avait voté un amendement dont la conclusion était celle-ci « le présent amendement se veut plus réaliste et retient un taux de recours égal à celui du RSA soit 32% et donc une réduction de 650 millions d’euros « . La vérité est cruelle parfois. Le taux de recours sera fin 2017 de 70%

 

Trompe-l’oeil encore que les commentaires autour des crédits pour l’AAH du programme 157 en direction des personnes en situation de Handicap.  

  • En hausse de 7.8% ils n’évolueront que de 3.9% par rapport à la consommation réelle. Et l’augmentation est entachée de quelques artifices regrettables:
  • L’obsession d’alignement par le bas ou par décalage calendaire reporte l’augmentation de l’AAH (de 811€ à 850 €) au 1 er novembre comme la plupart des mesures sociales. Les mesures fiscales elles, sont applicables dès le 1 er janvier prochain. Un tel déferlement de reports en fin d’année constitue pour le budget 2019 une véritable bombe à retardement.
  • Alignement encore par le bas – évidemment – sur le RSA pour les couples de bénéficiaires de l’AAH. Jusqu’alors chacun recevait son AAH au taux plein. Le coefficient multiplicateur, demain, ne sera plus de 2 mais de 1.9 puis de 1.8.

Reprendre d’une main ce qu’on a donné de l’autre en ne communiquant que sur ce qu’on a donné est devenu une règle que nous ne saurions partager.

 

Que dire de la primauté exceptionnelle prise par le verbe sur l’action. Vous avez dit « Grande cause nationale »

C’est un fossé, que dis-je un ravin, un océan  qui sépare parfois le discours de la réalité. Ainsi  l’égalité entre les femmes et les hommes aurait  été érigée au rang de grande cause nationale. Or,  Les crédits de l’action en faveur de l’égalité professionnelle, politique et sociale entre femmes et hommes  diminuent de 12%

Le crédits pour la prévention et l‘accompagnement des sorties de prostitution diminuent de 35% .

 

Et l’avenir, pour les plus modestes et les collectivités ne se dessine pas sous les plus heureux auspices

De nombreuses questions restent en suspens

 

  • Les allocations individuelles de solidarité (APA, RSA, PCH) grèvent dangereusement les budgets des départements. La négociation engagée par Manuel Valls sur la renationalisation du RSA n’a pas abouti.
  • Et la réduction des ressources de la CNSA affectées aux départements va encore diminuer passant de 70% à 61.4%.
  • Les déclarations du Président de la République lors de la conférence des territoires en faveur du regroupement des allocations individuelles de solidarité et leur reprise en main par l’Etat n’augure rien de bon pour la population la plus vulnérable de notre pays.
  • Il apparaît bien que la tentation libérale d’un Welfare  à l’Américaine globalisé et minimal, des dispositifs d’insertion réduits au profit de petits boulots sous statut d’auto-entrepreneur demeure manifestement présente chez certains. Déjà la diminution drastique des contrats aidés dans la LFI pour 2018 en est un signe précurseur.

Beaucoup de générosité pour les riches, un peu de compassion pour les pauvres rendent inacceptables, pour nous, les propositions de la mission solidarité.

 

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