Question au Gouvernement sur la crise des urgences à l’hôpital


Lors de la séance de Questions au Gouvernement du 11 juin 2019, j’ai interrogé la ministre de la Santé sur la crise des Urgences à l’hôpital

 

http://videos.senat.fr/video.1202435_5cff9fc02bb30.seance-publique-du-11-juin-2019-apres-midi

 

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Jean-Louis Tourenne. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Lors des débats sur le projet de loi Santé, Bernard Jomier et Laurence Rossignol vous indiquaient, madame la ministre, à quel point la situation dans les services d’urgences était désastreuse et combien les solutions proposées seraient de faible effet.

Aujourd’hui, 90 services d’urgence sont en grève. Les personnels sont dévoués, compétents, mais fatigués, usés et souvent au bord des larmes quand les admissions croissent chaque année, jusqu’à atteindre 21 millions selon les derniers chiffres. Et tout cela sans augmentation de moyens, au contraire. Près de 50 % des médecins exerçant aux urgences sont contractuels, donc précaires.

Pourtant, les signaux d’alarme n’ont pas manqué. Le décès de Micheline à Lariboisière après 14 heures sur un brancard n’était pas le moindre…

Face à cela, vous n’êtes avare ni de culpabilisation des grévistes ni d’affirmations sur votre maîtrise de la situation. Les grévistes surchargeraient leurs collègues, selon vous. Mais s’ils sont en grève, c’est parce qu’eux-mêmes sont surchargés toute l’année. Et qui en est coupable ?

À vous entendre, la réformette de l’accès aux soins révolutionnerait notre système de santé. La désertification médicale appartiendrait quasiment au passé, la suppression du numerus clausus serait la panacée miraculeuse… Et j’en passe !

Derrière les incantations, la réalité, c’est plutôt la désespérance exprimée dans la rue par les personnels hospitaliers face à l’obsession aveugle de supprimer partout des postes.

Vous leur opposerez sans doute que la sécurité sociale, annoncée en excédent, s’enfonce finalement dans un déficit qui pourrait atteindre les 4,4 milliards d’euros. À qui la faute ?

Madame la ministre, en dehors des 700 millions d’euros que vous leur attribuez, pris sur les gels de l’an passé, quels moyens efficaces entendez-vous mettre en œuvre pour ouvrir un horizon plus souriant aux personnels hospitaliers et aux Français qui, majoritairement, soutiennent leur mouvement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Tourenne, qualifier le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé de « réformette » n’est pas digne.

En 2016, une loi de modernisation de notre système de santé a été votée et, à ma connaissance, elle n’a pas laissé les hôpitaux en meilleur état qu’ils ne l’étaient cinq ans auparavant. Tout le monde doit être humble aujourd’hui face aux difficultés à trouver des médecins, dans le contexte d’une démographie médicale catastrophique. Nous payons aujourd’hui les décisions prises voilà trente ans.

Avec humilité, j’essaye de trouver des solutions. J’ai proposé une réforme ambitieuse, dans laquelle je vais demander aux professionnels de ville de mieux s’organiser pour pouvoir partager les tâches et de mieux coopérer autour des patients chroniques, pour libérer du temps médical, pour que les médecins urgentistes puissent se focaliser sur les vraies urgences, et pas forcément les besoins de soins non programmés de nos concitoyens.

La réforme que je propose est financée. Je viens de dégager plus de 700 millions d’euros pour l’hôpital, avec une augmentation des tarifs pour 2019. J’ai demandé en outre qu’une partie de ce budget soit fléchée pour améliorer les conditions de travail dans les services d’urgences, notamment pour rénover les locaux. Beaucoup sont trop petits pour accueillir le nombre de passages, d’autres sont vétustes, ce qui accroît les difficultés des soignants. Certains me diront qu’il ne suffit pas de repeindre. Ils ont raison, mais je veillerai à ce que nos concitoyens bénéficient de conditions d’accueil plus dignes.

Par ailleurs, des mesures ont été proposées la semaine dernière devant le Congrès national des urgences. Elles visent à attribuer des rémunérations individuelles aux soignants qui sont soumis à des rythmes et des conditions de travail difficiles. La prime de risque sera harmonisée sur l’ensemble du territoire pour que tous les soignants des urgences puissent en bénéficier. D’autres mesures sont proposées, mais je reviendrai dans le détail sur leur mise en œuvre d’ici à la fin de la semaine. (Mme Françoise Gatel, MM. François Patriat, Jean-Claude Requier et Jean-Marie Janssens applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour la réplique.

M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, vous plastronniez lorsque le budget était en équilibre grâce aux efforts de la gauche pendant des années. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Maintenant qu’il est en équilibre, vous puisez à pleines mains dans les caisses de la sécurité sociale et vous n’avez plus de moyens pour satisfaire les besoins de l’hôpital ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)